BRUXISME : COMMENT DESSERRER
LES DENTS ?
N’avez-vous jamais serré les dents de façon prolongée ? On estime à 8 % le
nombre de personnes atteintes par ce trouble de l’appareil manducateur,
et à 70 % le nombre d’adultes ayant connu au moins un épisode de bruxisme au
cours de leur vie. Insomnies, céphalées, douleurs cervicales, dorsalgies,
acouphènes, déchaussement des dents mais aussi fibromyalgie,
côlon irritable, syndrome de fatigue chronique, troubles de l’humeur… les
conséquences désastreuses sont nombreuses dans la vie du bruxomane.
Le corps médical néglige encore la gravité d’une telle affection et ne
dispose pas d’une prise en charge homogène. Les malades sont peu nombreux à
avoir une réponse thérapeutique satisfaisante.
On serre des dents ou on les ronge... c'est incontrôlable !
Le bruxisme est une dysfonction temporo-mandibulaire
(DTM). C’est un trouble fonctionnel incontrôlé qui
provoque le serrement et/ou le grincement des dents. Il s’agit d’une parafonction, un mouvement involontaire sans but ni
fonction particulière se manifestant le plus souvent la nuit. Ce terme regroupe
deux affections aux conséquences différentes.
Il y a celui qui grince...
Et celui qui serre
La dent, sur-sollicitée par le bruxisme, informe mal le cerveau
La dent n’est pas seulement un bout d’os, un bloc minéral. Elle est équipée
d’une double innervation sensitive : tactile et douloureuse. Dans des
conditions normales, les dents ne sont jamais en contact à l’exception de la
mastication et de la déglutition. Lorsqu’elles se touchent, les dents envoient
un message tactile non douloureux au cerveau afin de débuter le processus de
digestion à travers la sécrétion des différents sucs. Mais dans le cas d’un
bruxisme, les dents sont sur-sollicitées, les messages nerveux sont donc
volumineux. Vous imaginez qu’avec une telle mauvaise pratique, le système nerveux
finit par devenir la victime de toutes ces informations. Avec un système
nerveux constamment sollicité, les conséquences sur la santé sont donc faciles
à imaginer.
Des craquements dans la bouche
Quand on souffre de bruxisme, les muscles élévateurs de la mandibule, masséters
et temporaux sont très développés et souffrent d’un déséquilibre fonctionnel.
Ce dysfonctionnement de l’articulation temporo-mandibulaire
(ATM) entraîne une douleur irradiante au niveau de l’oreille avec difficultés
pour ouvrir la bouche, voire un blocage et des craquements au moment de
l’ouverture.
Les fibres alvéolo-dentaires, qui normalement
maintiennent la solidarité avec l’os alvéolaire, sont altérées, entraînant
souvent une parodontite (inflammation des gencives, déchaussement des dents)
puis une mobilité, voire une perte, des dents. À terme, la malocclusion
dentaire qui, au départ, est une des causes du bruxisme, va se détériorer
encore et renforcer le dysfonctionnement temporo-mandibulaire.
C’est un cercle vicieux.
Maux de tête, fatigue, douleurs... la posture se modifie
Cette parafonction a également des répercussions sur
tout l’organisme en entraînant un déséquilibre du terrain neuromusculaire,
ce qui influence directement l’ensemble postural et neurologique, entraînant
des douleurs vertébrales, articulaires et une atteinte du système nerveux.
Ainsi, le syndrome de fatigue chronique, les céphalées, les douleurs
abdominales, les troubles du sommeil, les atteintes digestives, mais aussi les
troubles de l’humeur, les cystites interstitielles, ou encore les acouphènes…
sont légion chez le patient qui serre les dents !
D’où vient le bruxisme ?
Plusieurs causes sont souvent mises en évidence :
Oubliez vite les gouttières !
L’occlusion dentaire désigne le rapport entre les dents du maxillaire supérieur
et le maxillaire inférieur. Une malocclusion est la résultante d’une
malposition des arcades dentaires et de l’emboîtement des mâchoires, quelle
qu’en soit la cause, édentation, carie, prothèse…
Habituellement, la solution proposée par la plupart des chirurgiens-dentistes
est le port de gouttières occlusales. Il s’agit d’un moulage effectué à partir
de la denture du patient, et porté la nuit, qui permet en théorie de diminuer
les symptômes et protéger les dents et la gencive. Cette solution peu coûteuse
est en en partie prise en charge par la sécurité sociale, mais c’est une
thérapie qui se révèle insuffisante, car inefficace au long terme. En effet, la
gouttière est une béquille qui rend le bruxomane
dépendant, sans résoudre le problème. Et le patient finit par bruxer sur la gouttière. Pire encore, l’expérience clinique
rapporte qu’après trente ans, on a fini par décrire des effets néfastes de ces
gouttières sur la posture et la respiration !
Si vous souffrez de bruxisme, voici la liste de ce que vous pouvez faire
afin de remédier au problème. Ces propositions ne sont pas exclusives les unes
des autres, et il est même recommandé de traiter le problème par tous ses
aspects via une prise en charge pluridisciplinaire. Certaines sont coûteuses,
d'autres non...
L'équilibre et le mode de vie
Le stress est une composante importante du bruxisme. Toutes les techniques
permettant de le réduire : sophrologie, relaxation, méditation… sont à prendre
en considération. La naturopathie veille à l’équilibre du terrain, avec la mise
en place d’une excellente hygiène de vie, à travers une alimentation saine,
riche en minéraux et antioxydants, et l’évitement des excitants et aliments
formateurs de toxines. Pour conserver une bonne vitalité et limiter les
épisodes de crispation/grincement, une détoxication de l’organisme peut être
envisagée, encadrée par un praticien de santé naturopathe.
Il y a des annuaires sur internet, cherchez quelqu'un près de chez vous
Je vous renvoie aussi à nos précédents articles sur le stress dans
alternativesante.fr
À essayer en premier
Une fine couche de Baume
du tigre appliquée sur les tempes (attention aux yeux) calme en général les
douleurs dues aux névralgies trigéminales.
Et tous les jours pendant un mois, pour une action régulatrice du système
nerveux central, l’Ashwagandha
Withania Somnifera est la plante conseillée.
Les huiles essentielles en application locale
Avant de vous lancer dans quelque chose de lourd, essayez cela. Dans bien des
cas, cela suffit.
Appliquez localement un mélange d’huiles essentielles de :
Gaulthérie couchée (Gaultheria procumbens) et
d’Immortelle (Helichrysum italicum), pour leurs propriétés myorelaxantes et
anti-inflammatoires naturelles. Mélangez-les à parts égales à une huile
végétale comme l'huile de millepertuis qui accroîtra l'effet
anti-inflammatoire. Faites cela pendant au moins une semaine, mettez-en sur le
visage après avoir testé sur l'intérieur du poignet (n'en appliquez pas autour
des yeux bien évidemment).
Orthodontie, réhabilitation occlusale
Les patients bruxomanes sont très souvent en
situation de déséquilibre occlusal. Pour équilibrer l’occlusion dentaire, un
traitement dentaire ou orthodontique, voire une
réhabilitation complète par reconstruction des arcades (ou pose d’implants),
est nécessaire. Seuls, certains chirurgiens-dentistes ultra spécialisés en
occlusion et en réhabilitation fonctionnelle sont en mesure de prendre
efficacement en charge le patient. Le choix thérapeutique est à adapter en
fonction de l’état de la denture.
Attention cependant, les dents constituent une réserve minérale importante
pour l’organisme. De plus, il a été rapporté qu’à la suite de certaines
extractions dentaires, le bruxisme survenait. Ainsi, toute extraction dentaire
devrait être le plus souvent évitée lors d’un traitement orthodontique.
Il s’agit d’une affection particulièrement délicate, pour laquelle il convient
de consulter un véritable spécialiste de l’occlusion et de la réhabilitation
fonctionnelle.
Ostéotomie des mâchoires
Nous l’avons vu, chez les bruxomanes, les muscles des
mâchoires sont en position de stress. Dans certains cas sévères de malposition
des mâchoires (anomalies dento-maxillaires
handicapantes physiquement), une chirurgie orthognatique
peut être proposée en vue de repositionner correctement les mâchoires, combinée
à un traitement orthodontique. C’est une chirurgie
lourde qui nécessite de nombreux jours de récupération, prise en charge
intégralement par la Sécurité sociale. Le rendu esthétique et fonctionnel est
très satisfaisant et le traitement a des répercussions positives sur l’ensemble
du corps : le visage retrouve son harmonie, l’occlusion dentaire est
rééquilibrée et la posture est alors corrigée.
Dans ce cas, un chirurgien maxillo-facial est le professionnel à consulter en
première intention.
Kinésithérapie : la rééducation maxillo-faciale
Certains kinésithérapeutes spécialisés ont également une approche
correctrice, en une dizaine de séances : des massages, à visée
décontracturante de la région cervicale et des muscles masticateurs, et à visée
sédative de la face et du crâne, de type stimulation de points réflexes.
Également, l’éducation et la rééducation linguale constituent une technique
prometteuse, avec une prise de conscience de la position de la langue tant
au repos qu'en activité.
La thérapie cranio-sacrée en ostéopathie
Le praticien ostéopathe prend en compte le système postural central, composé de
deux sous-systèmes qui interagissent : le sous-système cranio-sacré
(qui est l’axe cranio-vertébral), et le sous-système cranio-mandibulaire, tout trouble de l’un ayant des
répercussions sur l’autre. Les manipulations et pressions exercées par le
thérapeute permettent d’évaluer et traiter les tensions et dysfonctionnements
induits par le bruxisme.
Par ailleurs, en cas de traitement orthodontique
ou de chirurgie des mâchoires, le traitement ostéopathique, d’une part, permet
de revoir l’équilibre postural du corps et ajuster les contraintes subies
par les mâchoires et le crâne, et, d’autre part, en complément de la
kinésithérapie, va aussi améliorer la récupération post-chirurgicale.
L’important est que toutes les parties du corps s’ajustent convenablement aux
modifications de l’occlusion.
Dans certains cas, l’ostéopathie peut également être combinée à la posturologie. Des semelles de reprogrammation posturale
pourront être confectionnées.
Consultez un ostéopathe spécialisé en thérapie cranio-sacrée.
La technique du professeur Hartmann
Le Professeur Francis Hartmann, chirurgien-dentiste, professeur à la Faculté
d’Odontologie de Marseille de 1975 à 1996, spécialisé en neurophysiologie, a
mis au point une technique de relaxation : La Thérapie Modératrice et
Relaxante.
Véritable pionnier dans le domaine en France, sa technique envisage une
correction du comportement. En prenant conscience de ses mauvaises habitudes
et en associant quelques exercices fonctionnels, une action modératrice et
myorelaxante s’opère chez le patient. Le professeur Hartmann recommande,
entre autres, de serrer les lèvres à la place des dents.
En vidéo sur youtube, il a l'air de
bien s'y connaître.
La toxine botulique à visée thérapeutique
Le bruxisme provoque un état de stress des mâchoires et donc une hypertrophie
des muscles masséters qui donne un aspect large et très carré au visage. Même
si nous ne recommandons pas l'injection de toxine botulique (Botox) à des fins esthétiques, ici, la toxine botulique
thérapeutique propose une solution durable. En bloquant les jonctions
neuromusculaires, son action permet de diminuer la puissance du muscle et son
volume, ce qui a un double intérêt esthétique et fonctionnel.
Les injections de toxine botulique thérapeutique dans les muscles masséters
et/ou temporaux sont ainsi un traitement efficace et durable du bruxisme, comme
dans tous les cas d’hypertrophie massétérine et
temporale. Le traitement est indolore.
Une seule injection est suffisante dans 65 % des cas, sans effet secondaire.
Les différents moyens décrits dans cet article permettent une approche
multidimensionnelle du bruxisme en conjuguant les savoir-faire de plusieurs
disciplines, pour un rétablissement global, complet et durable.
Audrey Ramamonjy