Chère lectrice, cher lecteur,
Avant de vous parler des larmes qui soulagent nos douleurs, parlons de celles
qui exaltent nos joies.
Ainsi la femme qui fait pleuvoir sur son amant ses baisers, ses parfums,
atteindra-t-elle avec lui le comble du bonheur par ses larmes d’amour
qui suivent le plaisir suprême.
On dit « pleurer comme une Madeleine ».
Mais pourquoi pleurait-elle tant, la Marie-Madeleine des Évangiles ?
Elle est restée dans les esprits une prostituée.
Mais on peut la voir autrement, comme une femme qui connaissait l’amour.
Et elle découvrit l’amour total, l’adoration, auprès de Jésus. C’est
pourquoi ruisselaient de ses yeux les larmes qui lui baignèrent les pieds.
Dans la littérature, les larmes
qui coulent sur les joues des femmes sont le plus souvent assimilées aux perles
et aux diamants.
« Ces larmes révèlent leur richesse intérieure,
la pureté de leur cœur », explique Jacqueline Kelen dans un chef-d’œuvre de sensibilité poétique intitulé
Les Larmes [1].
Perles et diamants fugitifs toutefois, dont nul ne peut s’emparer,
rendant ce trésor plus précieux encore.
Femmes, connaissez le prix de vos larmes !
On pleure de rire, évidemment,
inutile de s’y attarder. Les mystiques pleurent d’extase, les amants
s’étreignent en pleurant. On pleure d’émotion devant un beau film, une belle
musique, un poème, un paysage, parfois.
La joie n’en est que plus intense. Elle se grave dans nos mémoires car elle
s’accompagne de sensations marquantes : la vue qui se brouille, les larmes
qui coulent sur les joues, l’afflux de liquide dans le nez, la gorge qui se
noue, les muscles du visage qui se contractent dans un sourire paradoxal.
Les plus douces émotions, comme les plus violentes, jaillissent
par les yeux.
Approcher de la Vérité, ce qui est le but des sages, des scientifiques, des
philosophes, des religieux, peut faire pleurer.
Il est ainsi écrit dans le Coran :
« Lorsqu’ils entendront les versets du Coran, tu
verras des larmes s’échapper en abondance de leurs yeux, car ils auront connu
la vérité. »
Les hommes pleurent moins
souvent que les femmes. Presque exactement deux fois moins, si on en croit une
étude réalisée aux États-Unis. Ils pleureraient en moyenne 1,9 fois par mois,
contre 3,5 pour les femmes [2].
Néanmoins, les occasions ne manquent pas.
Ulysse pleure de nostalgie en évoquant sa lointaine patrie, Ithaque, où reste
sa fidèle Pénélope. Le héros Achille pleure lorsqu’il comprend qu’il ne reverra
pas son pays natal. Le prophète Jérémie verse des torrents de larmes, qui s’en
iront grossir les fleuves de Babylone, devant les malheurs de son peuple…
Ce qui me permet d’enchaîner avec les pleurs qui soulagent, ou même
guérissent le cœur.
En cas de douleur, de choc,
d’angoisse, de déception, pleurer peut nous soulager.
Cela paraît inexplicable.
En réalité, on sait aujourd’hui que pleurer :
D’où ce paradoxe : quand
on pleure, les émotions deviennent plus violentes. Mais après quelques minutes,
on se sent, au contraire, étrangement soulagé.
Les larmes sont un moyen de lâcher physiquement les émotions négatives. Elles
libèrent des douleurs, du stress et de l’angoisse.
C’est une véritable souffrance que de ne pas parvenir à pleurer face au
malheur. Les yeux secs, nous nous désolons de ne pas parvenir à exprimer, et
donc à évacuer, notre tristesse.
Rien de plus difficile que de
cacher que l’on pleure. Et c’est fait pour !
Car pleurer est important socialement. C’est le signal, pour les autres, que
vous affrontez un problème qu’il est au-dessus de vos forces, au moins
provisoirement, de gérer seul.
Cela provoque un mouvement d’empathie : en cas de douleur ou d’accident,
les larmes font accourir l’entourage (les enfants le savent bien, et
l’exploitent !) ; au milieu d’une dispute, les cris cessent.
Pardonner devient plus facile, se réconcilier aussi, grâce aux larmes.
Les serments, les supplications, sont plus crédibles lorsqu’ils sont
accompagnés de pleurs.
Les pleurs sont sans doute un avantage important pour la survie de l’espèce.
Ils nous aident à solliciter de l’aide quand nous n’en aurions pas eu la
force, l’envie ou la capacité. Ils déclenchent un réflexe de secours chez les
autres.
Attention, toutefois : les personnes qui pleurent
facilement sont considérées comme plus chaleureuses, plus sympathiques… mais
aussi comme moins compétentes [3].
À votre santé !
Jean-Marc Dupuis